Pionnier des AMAP en France, Jérôme Laplane a depuis longtemps fait le pari de renouveler le rapport du paysan au sol, aux plantes et à ceux qui les mangent. Car la terre qu’il cultive à Roquevaire a beau être celle de son enfance, elle ne le retient pas de toujours viser loin.

S’il a de multiples casquettes, Jérôme Laplane se veut d’abord paysan et maraîcher. Et à le voir arpenter les sept hectares de sa ferme de Roquevaire on n’en imagine pas forcément davantage. Pourtant, l’homme imposant et affable qui travaille ici en famille avec quelques employés, n’est pas n’importe quel maraîcher. Converti en bio en 1998, il s’est constitué en AMAP* dès 2001, l’année même du démarrage des AMAP en France. Et pour cause, c’est dans le bassin d’Aubagne que toute l’aventure a démarré et Jérôme en a immédiatement fait partie.

Notons au passage que les pionniers français de la formule ne prétendent pas avoir inventé quoi que ce soit. Mais encore fallait-il croire au modèle, celui des Teikei apparus au Japon dans les années soixante. « Des femmes, rappelle l’agriculteur, ont pris conscience qu’en donnant le sein à leur bébé elles se vidaient à travers le lait des pesticides utilisés par les paysans. Elles sont donc allées voir un producteur en lui proposant d’acheter sa récolte d’avance s’il arrêtait de mettre ces produits ».

Repenser l’acte de consommation

Or c’est bien là un des fondements de l’AMAP : l’avance sur récolte. Elle est associée à un rapport de consommation inversé où l’acheteur adhérent ne choisit plus les produits au gré de ses envies mais en acceptant les variations de récoltes rencontrées par le producteur. Et même d’être solidaire des éventuelles catastrophes climatiques ou épidémiologiques. De son côté, ce dernier s’engage à respecter le non-emploi de pesticides et à fournir chaque semaine un panier maraîcher à ses adhérents.

Un système où tout le monde est gagnant. L’agriculteur, qui y trouve une stabilité de trésorerie plus qu’appréciable, voit baisser les coûts de sa production qu’il vend alors à l’adhérent à un prix équivalent au conventionnel. Lorsqu’il n’en donne pas carrément une part. « Quand je fais mon planning prévisionnel de plantation, je compile les besoins de tous mes systèmes de ventes pour produire en conséquence. L’excédent est offert dans les paniers ». Pour 23 € la semaine, l’adhérent peut ici se retrouver, selon les saisons, avec un panier valant en réalité 20 € mais bien souvent 25, 30… et jusqu’à 45 € au cœur de l’été ! 

En AMAP, tous heureux !

Le paysan l’affirme tranquillement : « J’ai trouvé un équilibre financier depuis que j’ai commencé en AMAP. Ce qui fait que je m’en sors pas mal alors que les filières maraîchères ne reçoivent aucune subvention ! ». Résumons donc : un paysan content, un consommateur bénéficiant d’une alimentation saine, variée et abordable, le tout en circuit court et sans polluer le sol. Qui dit mieux ?

Reste pour celles et ceux qui malgré ça ne souhaitent pas entrer dans l’association – et sont donc prêts à payer plus cher – la possibilité d’acheter en mode « classique » le vendredi après-midi à la ferme de la Dorgale, où l’affluence ne se dément jamais. Ou bien sur le marché du Cours Julien à Marseille où le producteur est présent le mercredi matin.

Depuis peu, il a aussi investi dans un laboratoire à sorbets. En ressort une gamme aux parfums joliment élaborés qu’il écoule au magasin « Chez les Producteurs », point de vente collectif des Jardins du Pays d’Aubagne. Il faut dire qu’en matière de collectif, Jérôme en connaît un rayon et a clairement choisi de ne pas s’en tenir à la seule gestion de son exploitation.

Un paysan ancré… dans le mouvement

Actif au sein d’Agribio 13 et de la confédération paysanne, il est également administrateur des AMAP de Provence et président de l’ADEAR 13, Association pour le Développement de l’Emploi Agricole et Rural, complément logique de l’objectif AMAP. Mais l’action qui aujourd’hui l’enthousiasme peut-être le plus est née de la rencontre avec Elisabeth Atangana, paysanne camerounaise désormais ambassadrice de la FAO. Ensemble, ils ont créé la Chassaad pour aider les petits paysans d’Afrique. Encore une aventure qui profite à tous. Mais voilà une autre histoire…

Yann Batlle

*AMAP : Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne

AMAP
– Marseille Bonneveine, mardi 19h-20h, Maison pour tous, Boulevard Zenatti
– À la ferme de Roquevaire, jeudi 18h
Vente à l’étalage
– Marché Paysan du Cours Julien (Marseille) le mercredi matin
– À la ferme le vendredi après-midi, 14h-19h toute l’année

Potagérome, 2360 La Dorgale, 13360 ROQUEVAIRE
06.71.11.29.82
laplane.jerome@gmail.com
http://potagerome.e-monsite.com