Anaïs Chotard ingénieure agronome

Ingénieure agronome, elle a travaillé 10 ans dans le développement de filières bio. Consultante, cette jeune mère de famille adepte des AMAP anime un blog avec la tranquille certitude que l’agriculture conventionnelle a vécu.

La rencontre a lieu au magasin de producteurs de Coustellet, « Naturellement paysan » qu’elle ne connaissait pas encore. L’occasion pour cette trentenaire toute en douceur et en curiosité de discuter avec le producteur présent.Anaïs Chotard ingénieure agronome rencontre un producteur au magasin de Coustellet

Anaïs Chotard est née à Paris, a grandi à Bruxelles  et pas mal voyagé. Une mère institutrice et un père dans la coopération européenne : une famille qu’on peut dire engagée. Pas étonnant que toute petite, son projet de vie s’énonce clairement : se rendre utile ! Et tout naturellement elle assoit ses convictions sur l’acte de base : manger… C’est ce secteur qu’elle voudra préserver et améliorer.

Revaloriser le métier

Mais pas contre les paysans. Bien au contraire ! « Je ne comprends pas que l’agriculteur soit aussi mal perçu. Le beau métier de paysan doit être revalorisé » affirme-t-elle d’entrée. Car les grosses exploitations sont fragiles, l’outil de production souvent ingérable  et intransmissible, les prix en dessous des seuils de rentabilité, l’endettement trop lourd. De plus en plus d’exploitants ont des problèmes de santé, liés à l’utilisation des pesticides.Ingénieure agronome, AnaIs Chotard en Afrique

« Sortir de l’agro-business »

Pour Anaïs, la sécurité alimentaire s’entend du double point de vue du producteur  – ses revenus, sa santé – et du consommateur. Des prix rémunérateurs, donc, mais abordables ! Pour que les paysans vivent plus dignement et produisent dans de meilleures conditions, une évidence s’impose : le bio.  « Avec ou sans chimie, les deux systèmes ne peuvent  pas être comparés. Même ce qu’on pourrait appeler la bio « industrielle » est à des années-lumière du système conventionnel. »

Alors Anaïs obtient le diplôme d’ingénieur à l’ISTOM. Une école d’agronomie tournée vers une approche globale  et les pays du Sud. Valoriser le travail des paysans, oui, et partout où c’est nécessaire !

Aider producteurs et filières

Salariée chez des grossistes en produits bio, Anaïs  s’engage aussi comme consultante pour un bureau d’études coopératif spécialisé dans le développement des territoires ruraux, TERO.  A ce titre, elle travaille pour le Parc Naturel Régional des Alpilles auprès de la filière oléicole. Objectif : faire évoluer les pratiques agricoles favorables à la biodiversité. Améliorer les performances, en développant une filière durable. Un travail qui la place entre de nombreux intervenants, non seulement les producteurs mais aussi les élus, enseignants, scientifiques, professionnels du tourisme, du commerce, etc… « Un agronome est un tisseur de liens » souligne doucement Anaïs Chotard, citant Erik Jansegers, ex-maraîcher de Terre et Humanisme.

Ingénieure agronome, A. Chotard en Afrique

« Un agronome est un voyageur… »

Autre engagement citoyen, celui qu’elle mène depuis plusieurs années pour l’association Agronomes et Vétérinaires sans Frontières. Première forme d’agriculture dans le monde avec près de 500 millions d’exploitations, l’agriculture familiale produit aujourd’hui plus de 80%  de l’alimentation mondiale… Et voilà notre jeune ingénieure agronome au Togo, au Burkina, en Tanzanie, à Madagascar ou au Bénin. Une agriculture pas forcément saine, quand des produits interdits chez nous ne le sont pas là-bas ! Une agriculture aux prises avec l’industrie semencière qui veut la priver de ses propres semences afin de lui vendre –très cher- les siennes.

« Il est urgent de changer d’agriculture »

Longtemps adhérente de l’AMAP de Cavaillon,  Anaïs anime un blog « pour informer et transmettre, notamment  ce qui marche bien ».  Et pour cette optimiste tranquille,  « on est arrivés au bout du système. Aujourd’hui on est obligés de constater qu’il a des limites. Il faut absolument investir dans de nouvelles formes de production et de commercialisation ». Anaïs Chotard ingénieure agronomeEt Anaïs en prend le pari : dans 10 ans, la situation aura bien évolué, cette agriculture héritière de la « révolution verte » ne pourra plus se développer. La norme sera durable, comme devra avoir disparu la dangerosité du produit, pour la santé et l’environnement.

Un jour elle en est sûre, elle installera une ferme pour exercer ce beau métier de paysan qu’elle aime tant.