Porté par le Parc naturel régional depuis 2017, le Projet Alimentaire Territorial du Luberon poursuit l’objectif de créer une dynamique autour d’une agriculture et une alimentation locales et durables. Un enjeu de santé, de transition et un pari pour protéger un secteur soumis à de fortes pressions.

Une « stat », une seule, en dit long : 50%. C’est la baisse du nombre d’agriculteurs sur le territoire du Parc naturel régional (Pnr) du Luberon entre 1988 et 2010. Autant dire que l’objectif du parc de favoriser « l’accès pour tous à une alimentation saine, locale et de qualité » est forcément ambitieux puisqu’il s’inscrit dans cette courbe paysanne décroissante.

Vieillissement des exploitants

Le Parc en a conscience. La pression foncière sur ce territoire touristique et le vieillissement des exploitants ne plaident pas en faveur d’un vent nouveau sur l’agriculture. Même si des jeunes se lancent avec conviction dans cette activité, leur arrivée ne compense pas le départ des anciens.

Freiner une spirale négative

Labellisé par le ministère de l’Agriculture et l’ADEME en 2017 et piloté par le Pnr, le Projet Alimentaire Territorial (PAT) du Luberon est vital pour tenter de freiner cette spirale négative. Car si habitants et touristes sont convaincus de l’intérêt de manger sain et local et qu’on leur en donne les moyens, peut-être y aura-t-il alors inversion de la « fatalité ».

Les produits maraîchers sont l’une des cultures excédentaires du Luberon. Crédit Philippe Bourget (Photo de Une, crédit Philippe Bourget)

11% d’autonomie alimentaire sur le territoire

« Nous sommes aujourd’hui à 11% d’autonomie alimentaire sur le territoire. Si on ne fait rien, nous tomberons à 7% dans 15 ans », fait remarquer Mylène Maurel, chargée de mission agriculture et tourisme au Pnr, porteuse du projet de PAT. Alors, depuis 10 ans, le Pnr se mobilise. Pour mettre en synergie producteurs, transformateurs, distributeurs et consommateurs. Pour préserver aussi les terres agricoles et favoriser l’installation de nouveaux exploitants.

Programme National pour l’Alimentation

« Nous avons commencé ce travail en 2009 de façon atypique. D’abord en valorisant les circuits courts, les filières locales et en créant le réseau « De la ferme à ta cantine ». Puis en impulsant en 2011 une politique de maintien des terres, à travers le « Réseau foncier agricole ». Ces démarches sont venues se greffer sur le Programme National pour l’Alimentation  [PNA, issu de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche de 2010, ndlr]. Nous avons alors candidaté pour être labellisé PAT », rappelle Mylène Maurel.

Le marché paysan de Lauris se tient tous les jeudis soirs. Crédit Philippe Bourget

Huit magasins de producteurs

Un an plus tôt, en 2016, un Forum Alimentaire organisé par le Pnr à Lourmarin avait servi de détonateur. Idées et projets avaient été posés sur la table lors de cet échange citoyen entre consommateurs, agriculteurs, institutionnels, associations… Depuis, le PAT s’est structuré et les initiatives ont fleuri. Huit magasins de producteurs sont désormais présents sur le territoire, il n’y en avait aucun en 2009. Et un 9ème doit ouvrir cet été à Cadenet. Plusieurs marchés paysans ont aussi vu le jour.

Le PAT, une fleur à six pétales

A Mane, expérimentation de blé de variétés anciennes. Crédit Philippe Bourget

« Le PAT est une fleur à six pétales. Un, il faut préserver les terres agricoles et faciliter l’installation paysanne. Deux, produire des filières locales de qualité [pain au blé meunier d’Apt, pomme de terre de Pertuis… ndlr]. Trois, structurer l’offre alimentaire. Quatre, connecter l’offre avec la restauration collective. Cinq, sensibiliser et éduquer. Et enfin, six, créer une identité de territoire et renforcer son attractivité », énumère la chargée de mission.

Outil d’abattage ovin mobile

Le PAT est désormais entré en phase 2. Il met l’accent sur la communication, la transformation des produits agricoles et la formation-éducation des acteurs. Ainsi, depuis 2017, la Confédération Paysanne s’implique à la création d’un outil d’abattage ovin mobile de proximité. Objectif : abattre les bêtes sur place plutôt que de les emmener à l’abattoir de Sisteron et éviter ainsi des transports couteux en temps et en émission carbone.

Formation des élus et des collectivités

Autre action : une formation pour les élus et les collectivités. Prévue de fin 2020 à juin 2021, elle devrait susciter de nouvelles vocations en faisant dialoguer entre eux des acteurs impliqués dans la démarche PAT et les autres. Des vidéos « grand public » sont aussi au menu pour mieux toucher habitants et visiteurs du territoire.

Les cerises, production fruitière symbole du pays d’Apt. Crédit Josiane Bouillet

Subsides régionaux plus limités

Vertueux dans son approche, le PAT se heurte encore à des difficultés. Elles sont d’abord financières. « Les moyens ont été là pour le lancement mais moins pour la continuité du projet », regrette Mylène Maurel. Soutenu au départ par le programme Leader et la Région Sud PACA, puis par l’Etat dans le cadre du PNA, le PAT doit à nouveau compter sur des subsides régionaux plus limités. Pour la responsable du projet, il gagnerait « à être mieux porté politiquement ainsi que par des porte-paroles agricoles qui s’approprient le projet ».

Rien ne sera de trop pour ce PAT qui deviendra gagnant seulement si toutes les énergies vont dans le même sens.