Elle a le vent en poupe. La vente directe de produits agricoles est vertueuse mais doit se conformer à trois exigences pour mieux fonctionner : des actions collectives, l’aide d’institutions locales et l’étude des « besoins clients ». C’est ce qu’il ressort de la table ronde organisée mardi 13 au salon.

Distributeurs automatiques, drives fermiers, vente aux collectivités locales, à des partenaires, halle de producteurs, marchés de plein vent, commerce à la ferme…. En matière de circuits courts, l’imagination est quasi sans limite. C’est ce que l’on retiendra d’abord de la table ronde organisée par la Chambre d’agriculture (CA) du Vaucluse mardi 13 octobre, dans le cadre du salon (virtuel) Med’Agri, à Avignon.

En direct de nos fermes

Il faut dire que la région Sud PACA est mobilisée. Plusieurs initiatives ont vu le jour ces dernières années pour connecter fermiers et consommateurs. Lancée dès 2015 par la Chambre d’Agriculture du Vaucluse et des producteurs, l’expérience « En direct de nos fermes » s’est concrétisée en 2017 par l’ouverture d’un chalet à distributeurs automatiques à l’Agroparc d’Avignon. Puis d’un second, en 2019, au parking des Italiens de la ville.

Les participants à la table ronde. On reconnait à gauche André Bernard, président de la Chambre Régionale d’Agriculture. Crédit Philippe Bourget (Photo de Une : Le chalet de distributeurs automatiques d’En direct de nos Fermes, parking des Italiens à Avignon – Crédit En direct de nos fermes).

Rémunération correcte

« Les distributeurs se vident plusieurs fois par jour », témoigne Hervé Larguier, arboriculteur à Cavaillon et membre de la structure. « De 12 agriculteurs en 2017, nous sommes passés à 20 en 2020 (…). On touche la clientèle en horaires décalés et on obtient une rémunération correcte de nos produits », analyse Michel Tort, président d’En direct de nos fermes et producteur, notamment, de fraises et de melons.

Drive fermier

L’association a aussi lancé un drive fermier. Les clients commandent en ligne et récupèrent leurs paniers sur l’un des deux sites ou dans une antenne à l’Ile-sur-la-Sorgue. En direct de nos fermes a également rejoint la plateforme Agrilocal 84, initiée par le département du Vaucluse en 2014 pour vendre à la restauration collective. C’est un autre canal de distribution, « important pour que le projet de l’association soit viable », dit Michel Tort.

logo En Direct de nos fermes

Le logo d’En direct de nos Fermes

Vendre aux cantines

« Vendre aux cantines, c’est possible », témoigne à nouveau Hervé Larguier. « Je livre des collèges jusqu’à 50 km autour de Cavaillon. Au-delà, d’autres producteurs peuvent prendre le relais. Mais les volumes ne sont pas conséquents et les exigences pointues : si c’est 500 pommes, ce n’est pas 450 ou 550 ! », met-il en garde.

Halle Terre de Provence

Ces initiatives existent aussi dans les départements voisins. « La halle de producteurs Terres de Provence, à Plan de Campagne, réunit trois fois par semaine une vingtaine de producteurs, en vente demi-gros. En 2019, elle a accueilli 90 000 visiteurs », témoigne Grégory Galtier, responsable des circuits courts à la CA des Bouches-du-Rhône.

En direct de nos fermes et le 1er chalet

Le 1er distributeur installé dès 2017 à l’Agroparc d’Avignon. Crédit En direct de nos fermes

Fonds FEADER

Ces idées ont été portées de manière collective et facilitées par l’appui d’institutions locales. Mieux vaut en effet se grouper pour engager une action que de démarrer seul dans son coin. D’autant que des aides existent sur des filières fléchées. En direct de nos fermes a ainsi bénéficié des fonds FEADER, financement appuyé et relayé par la CA 84, le Grand Avignon et la ville d’Avignon, qui ont investi en communication sur les distributeurs automatiques.

Agrilocal 84, vente aux collectivités

Des formations sont aussi dispensées par les CA 84 et 13 pour les agriculteurs qui auraient des projets similaires. Côté département, en charge d’Agrilocal 84, on rappelle que cette « plateforme est gratuite et permet une dématérialisation des marchés publics. La loi Egalim oblige les collectivités à acheter local et bio. Les agriculteurs ont intérêt à se grouper pour travailler ce marché », encourage Pauline Ricard, en charge de la plateforme.

En direct de nos fermes, l'association a choisi les circuits courts

Camionnette et vélo pour livrer au plus près et au plus frais. Crédit En direct de nos fermes

Forum Agrilocal

Le département organise ainsi chaque année le forum Agrilocal. Il met en contact direct producteurs et acheteurs de la restauration collective. Des marchés ponctuels ou récurrents en fruits ou en légumes, portant en moyenne sur 400 à 500 personnes. Pas négligeable.

Une crise, une opportunité

La pandémie de la Covid-19 a montré que les clients étaient friands de circuits courts. Si « d’une crise, il faut en faire une opportunité », selon les mots du président de la Chambre Régionale d’Agriculture Paca André Bernard, la réponse n’est pas toujours naturelle et exige un marketing adapté. Un point de vente « producteurs » en ville doit ainsi se poser la question de son accès (parking facile), de sa visibilité, de son réassort (quand et comment), de la gamme de produits vendus…

Le logo d’Agrilocal 84

Boom du e-commerce alimentaire

En plein boom, le e-commerce alimentaire doit faire face à une concurrence accrue. Un challenge pour les drive fermiers. « On est passé de 30,4 millions de cyber-acheteurs en 2011 à 40 millions en 2020. En alimentation, les groupes coopératifs agricoles et la GMS ont des ambitions et sont appelés à devenir de sérieux concurrents », illustre Anne Pyt-Bennato, de l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture.

Animations et rencontres… réelles

Parmi les évolutions, la livraison le jour même est devenue un must. L’achat sur terminal mobile, lui, s’accroit et touche désormais 3 acheteurs sur 10. Nombre de vendeurs deviennent aussi « omnicanal », c’est-à-dire présents sur un site web en propre, en marque blanche sous une bannière spécialisée (telle « La Ruche qui dit oui »…), en marketplace… « Un drive fermier ne doit pas être que virtuel. Il faut aussi des animations, des rencontres avec les producteurs », insiste la spécialiste. En matière de nourriture, rien ne peut être définitivement désincarné et la relation directe producteur-consommateur est le meilleur garant de la fidélisation.

Pour aller plus loin

Veni, vedi, Vinci !

Un contact entre la CA84 et Vinci Autoroutes Méditerranée s’est conclu par un partenariat avec des agriculteurs vauclusiens. Qui ont livré des produits fermiers sur l’aire de Morières et au restaurant d’autoroute de Mornas. « Nous avons besoin de favoriser l’arrêt sur nos aires, de les différencier les unes pas rapport aux autres. Les clients veulent de l’expérience sensorielle », témoigne Laurent Noé, responsable communication Méditerranée chez Vinci Autoroutes. Pourquoi pas demain des salades et des fruits du Vaucluse dans les TGV Avignon-Paris ?