Relocaliser l’alimentation, un combat de longue haleine

table de cantine
table de cantine

Toucher à l’alimentation, c’est agir sur notre santé bien sûr, mais aussi sur celle du territoire -son économie et ses acteurs- sur la précarité alimentaire et la justice sociale. Dans notre région, une multitude de structures s’y attellent, sous la dynamique des acteurs publics.

Dans notre quotidien alimentaire, on trouve les courses, la cuisine, peut-être la cantine pour les enfants, le restaurant des aînés à l’Ehpad, ou celui de notre entreprise. Mais aussi le repas partagé grâce à une association locale, ou encore l’épicerie solidaire et tout simplement le plaisir.

Derrière ce quotidien auquel on ne réfléchit pas toujours, tout un réseau se tisse, depuis les agriculteurs, les chaînes logistiques, les cuisines de la restauration collective, jusqu’aux agences de l’État et de la région, qui impulsent et qui financent la politique de l’alimentation. Au service des consommateurs de tous âges. 

Pour quels enjeux ?

« La relocalisation de l’alimentation va dans le sens de la souveraineté alimentaire, ce qui est produit sur le territoire y est consommé, explique Karine Pascal-Suisse, cheffe du pôle Politique de l’alimentation à la DRAAF-PACA. Elle a un avantage économique par la structuration des filières, elle permet le maintien des agriculteurs dans une production vivrière et dynamise tout le territoire ».

la ferme municipale de Carpentras
Deux agents municipaux travaillent toute l’année à la Ferme de la Denoves. La régie municipale de Carpentras fournit les légumes des cantines de la ville ©JB

De plus, la loi Egalim, qui prône les produits bio, durable et sous signe de qualité, pousse vers une transition écologique et alimentaire. Cette loi est un levier d’action pour réduire les GES, dont 25% sont dus à ce que l’on mange.

Par quels moyens ?

C’est ici que notre région se distingue. Sous l’impulsion de la DRAAF, une instance de gouvernance est née : Co’alim (voir encadré ci-dessous). Elle réunit toutes les structures déconcentrées et agences de l’État, concernées par l’alimentation durable, ainsi que la Région. Tous les mois, ces six acteurs se rencontrent. Objectif ? Répartir les financements dont ils disposent auprès du terrain.

« Cette cohésion, cette gouvernance Co’Alim, potentialise les financements et leurs effets et les mobilise de manière efficace en évitant les doublons, poursuit Karine Pascal-Suisse. Si un financement est réduit d’un côté, une autre agence peut prendre le relais, c’est comme des vases communicants ! » Une efficacité qui n’a pas échappé aux autres régions, où la structure essaime…

15 chefs en cuisine à Vaison la Romaine
15 chefs de cuisine dans des établissements scolaires en formation avec Agribio84 ©JB

Détail important : ce ne sont pas les agences de l’État qui décident des projets, mais les acteurs de terrain qui font remonter leurs demandes. Notamment les PAT, les projets alimentaires territoriaux.

Les PAT en pleine croissance

Là aussi, la région se distingue. Elle en compte 29, et 4 candidats de plus pour l’an prochain. Plus de 80% sont opérationnels (contre 56% seulement au plan national) et 17% au stade « émergent » (contre 44% pour la France). 90% de la population et 95% du territoire sont couverts par un PAT. Celui de la métropole Aix-Marseille-Provence et du PETR d’Arles concerne plus de deux millions d’habitants, record absolu ! Celui de Mouans-Sartoux (06) coche toutes les cases du parfait PAT. Il sert d’exemple au plan national et même international.

Dans ces temps de contraction du budget de l’État, Co’alim est un outil précieux. Le dispositif agit au travers de trois thèmes d’intervention : la précarité avec Prec’alim, le gaspillage alimentaire avec Reg’alim et l’éducation alimentaire avec Educ’alim. La gouvernance finance ainsi non seulement des actions comme pour les PAT, mais aussi des réseaux, avec un effet levier des plus efficaces. Par exemple pour Educ’alim, à travers la formation de formateurs, auprès des associations qui travaillent sur l’alimentation durable.

La loi Egalim tire la restauration collective

À côté des PAT, la DRAAF agit pour l’alimentation durable grâce aux lois Egalim et Climat et résilience. Ces lois, incitatives, prévoient 50% de produits de qualité et durables, dont 20% de bio, dans les restaurants collectifs du public comme du privé. Mais aussi la lutte contre le gaspillage alimentaire et l’usage du plastique. Elle prône enfin la transparence sur les produits, vis-à-vis des convives.

manifestation pour l'alimentation locale à Apt
Apt l Sur les stands des acteurs du festival « Vivant ! » rencontres et découvertes du public autour de l’alimentation locale et saine ©JB

Ici s’impose un travail de long terme pour obtenir des changements de comportement autant dans les cuisines que chez les convives. Éducation, information, ateliers, actions dans les cantines. Là aussi, de nombreuses associations et structures interviennent.

Résultat aujourd’hui ? Le nombre de cantines engagées en PACA est passé de 20 à 47% entre 2022 et 2024 (chiffres nationaux : de 11 à 38%). Pour la qualité des produits aussi, la région fait mieux que la moyenne nationale : en 2023, 15% de produits bio contre 12% au plan national et 28% de produits de qualité et durable contre 27%.

La transition alimentaire est en marche

Condition de la réussite de ces politiques, et notamment du plein développement des PAT, l’investissement des élus. Car tous les projets alimentaires doivent travailler sur l’économie avec la structuration des filières par exemple ou le foncier, mais aussi sur la santé, l’environnement et la justice sociale. Un travail exigeant !  Même issus d’un cadre unique, aucun PAT ne ressemble vraiment à un autre. Car ils émanent des attentes, des besoins, des spécificités et des envies du terrain.

Autour de l’alimentation et de la nécessité de sa transition au bénéfice de la santé et de l’environnement, un certain consensus semble exister. « Face aux restrictions budgétaires, la politique de l’alimentation se maintient, on soutient toujours les PAT globalement, constate la responsable de l’alimentation à la DRAAF PACA, ainsi que la juste rémunération des producteurs ». En 2023, sept millions d’euros ont été consacrés aux PAT dans la région.

Co’alim, kezako ?

Attention, sigles en vue ! Mais on vous explique tout ! La DRAAF, (la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt,) c’est le service déconcentré en région du Ministère de l’agriculture, de l’agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire. A ses côtés dans Co’alim, on trouve la Santé, grâce à l’ARS (l’agence régionale de santé), l’Economie et le Social avec la DREETS (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités, l’Environnement avec la DREAL (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement). Ces directions régionales sont chargées de mettre en œuvre la politique de leur ministère, sous l’autorité du préfet de région. Dans Co’alim s’y ajoutent l’ADEME ( l’agence de la transition écologique) et la région Sud Paca.

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