Jeudi 11 décembre à Goult (84) : un petit groupe de viticulteurs du territoire Luberon-Monts de Vaucluse participe à une demi-journée de rencontres. Au menu, « arbres, chauves-souris, eau, pâturage, couverts ». Autant de pratiques agroécologiques qui les intéressent mais qui les questionnent aussi.
L’un confie avoir un problème récurrent avec l’herbe sous le rang, une autre avec ses couverts, qui ne poussent pas suffisamment… Les viticulteurs présents sont déjà engagés dans des pratiques agroécologiques, intéressantes face au changement climatique. Mais ils ont soif d’aller plus avant et de partager conseils et bonnes pratiques.
« Eau-sol-arbres », le trio gagnant
L’atelier technique est proposé par le Groupe de Recherche en Agriculture Biologique (GRAB) et la Chambre d’agriculture de Vaucluse. Lionel Asin lui, est viticulteur bio au Luc, dans le Var. Il vient témoigner de ses pratiques. « Pour moi, un projet agroécologique permet de produire du vin, mais en se demandant quelle est notre place dans le vivant. ».
En soulignant que l’humanité a déjà dépassé sept des neuf limites planétaires, celui qui est aussi membre de l’association Les Résilients (Les R-TLGS) envisage l’agroécologie comme une démarche globale. « Toutes nos actions se situent dans ce tryptique : eau-sol-arbres. Des sols couverts favorisent la circulation et la conservation de l’eau, les arbres fabriquent de la biomasse. »
Des pratiques, oui, mais aussi des questions
Une fois les principes annoncés, reste à déterminer ses objectifs précis pour chaque parcelle (conserver l’eau, lutter contre l’érosion ou la sécheresse, réduire son bilan carbone, favoriser la biodiversité…). Et bien sûr tenir compte de ses caractéristiques géographiques, chimiques et paysagères. Sans ces pré-requis, l’échec guette. D’où l’intérêt de ces ateliers d’échanges.
Semer un rang sur deux ou tous les rangs ? Broyer les couverts végétaux ou les faucher ? À quelle époque ? Et lesquels choisir ? Planter une haie ou des arbres isolés ? En bordure de parcelle ou à l’intérieur ? Et avec quelles essences ? Pour répondre à ces questions, des membres de l’Association pour le Développement de l’Agroécologie et l’Agroforesterie (ADAF), installée dans la Drôme depuis 2015, présentent les résultats obtenus par le collectif de viticulteurs qu’elle accompagne, et l’outil d’aide à la décision « DECIDUOUS », mis au point par le GRAB et l’INRAE.
Nos amies les chauves-souris
25 ans que Fanny Albalat travaille sur ces « auxiliaires invisibles » ! Capables d’avaler à la tombée de la nuit entre un tiers et la moitié de son poids en insectes, les chauves-souris consomment de nombreux ravageurs des cultures. Selon la chiroptèrologue, des études menées en Espagne ont démontré que la pyrale du riz reste sous le seuil d’infestation là où de nombreux nichoirs à Pipistrelle sont installés. Pas moins de 28 espèces sont présentes dans le département. Protégée depuis 1976, la chauve-souris a pourtant perdu près de la moitié de ses effectifs entre 2006 et 2021.


Pour aider ce précieux auxiliaire, de plus en plus d’agriculteurs installent des nichoirs. Mais il est aussi primordial de conserver les corridors qui lui permettent de se déplacer jusqu’au territoire de chasse, grâce aux haies et arbres à trous ainsi que les points d’eau. La Pipistrelle par exemple, présente dans la région, chasse entre un à cinq km de son gîte.
« Aller de plus en plus dans nos pratiques »
À l’issue des présentations, beaucoup de questions demeurent et les viticulteurs présents ont besoin d’échanger entre eux. Clotilde et Juan, installés en bio à Goult, sont avides des retours d’expériences des collègues afin de mettre en place leurs projets. « On veut améliorer notre impact positif sur l’environnement, énonce Clotilde, avoir les raisins les plus qualitatifs tout en restant viables économiquement ».
Le jeune couple est à l’affût d’autres structures ou associations dont l’expérience pourrait leur être profitable. « Dès lors qu’on partage des informations avec une restitution d’expérimentations ou même entre nous, c’est positif, confirme Frédéric Chauvin, viticulteur à Apt. L’agriculteur, il est un peu seul. En échangeant, on peut innover et progresser ».
Déjà impliqué dans deux Groupements d’Intérêt Economique et Environnemental (GIEE) sur la réduction du carbone et la plantation d’arbres, le viticulteur qui a travaillé en priorité sur l’équilibre du sol refuse de rester dans la solitude. « J’aime bien les groupes où on mélange les origines des gens et les expériences ».
