Défendre les paysans et les terres agricoles, multiplier les espaces cultivés en ville, sensibiliser les citadins, favoriser le vivre ensemble, fédérer les acteurs… Tels ont été les piliers du Festival « Les 48h de l’Agriculture Urbaine », organisé les 10 et 11 octobre.

 Lancée en 2015 à Paris par l’association SAUGE – Société d’Agriculture Urbaine Généreuse et Engagée, la 6e édition du festival a conquis 15 villes en France en 2020. Les 10 et 11 octobre dernier, Toulon faisait figure de petite nouvelle. Agriculture et vivre-ensemble ont fait des étincelles… vertes bien sûr !

Souvenir des jardins ouvriers…

48 h agri Toulon

Le festival des 48h de l’agriculture urbaine de Toulon – 1ère édition – ©ACAUDRA

L’agriculture urbaine ne date pas d’hier. Les villes ont été le plus souvent bâties à proximité de bassins fertiles. Avec la révolution industrielle et l’évolution de la société, le moindre espace non bâti devient alors une réserve foncière. Et les terres cultivables sont reléguées dans les campagnes voisines. C’est à la faveur de crises alimentaires, environnementales et immobilières que cette forme d’agriculture réapparaît dès le 19e siècle.
Les citadins cultivent des jardins ouvriers ou des hortillonnages, comme ceux, célèbres, d’Amiens. Le but : retrouver une indépendance alimentaire, mais aussi se ressourcer et partager des moments de vie ensemble. Par essence multifonctionnelle, l’agriculture urbaine génère aujourd’hui des bénéfices induits sur les espaces urbains et les habitants. Elle permet d’allier projets culturels, pédagogiques et environnementaux. De belles perspectives pour la ville de demain.

Un collectif varois pour fédérer

La Métropole Toulonnaise n’échappe pas à cet essor. Des acteurs engagés, des idées, les membres du Collectif Varois pour l’Agriculture Urbaine n’en manquent pas. Créé en août 2020 pour porter le Festival, ce collectif veut révéler le potentiel de l’agriculture urbaine auprès des habitants et des élus. Pour Isabelle Canal, présidente du Collectif, « il est temps de retrouver des jardins nourriciers et gourmands au cœur de nos villes ». Revue de détail sur les pratiques et réflexions, mises en lumière ce week-end à Toulon et dans sa région.

Agir avec le jeune public

Marie-Christine Sarr, médiatrice culturelle et scientifique chez Mer Nature à Toulon, fédère ainsi des écoles pour créer un réseau entre pairs et cultiver la nature en ville. Activités ludiques, jardins partagés, végétalisation dans les cours d’écoles, approvisionnement local dans les cantines…

les élèves de Toulon jardinent

Sensibiliser les plus jeunes dans les écoles – ©ACAUDRA

De l’école primaire Lazare Carnot à l’ISEN (école d’ingénieurs des métiers du numérique), en passant par les lycées Bonaparte à Toulon ou Langevin à La Seyne-sur-Mer, un véritable écosystème se met en place pour initier les enfants et les jeunes. Pour Marie-Christine, « la dimension ludique et artistique permet de sensibiliser sans culpabiliser. S’émerveiller devant la nature et mettre les mains à la pâte, c’est une manière de préparer les citoyens de demain. »

Dans les entreprises aussi

Les toits des bâtiments, les espaces verts aux pieds des immeubles de bureaux, toute zone libre peut être investie pour cultiver la ville. Et cela contribue aussi à fédérer les équipes. Deux entreprises locales, Sème et Récolte et Bee Shelter ont compris l’intérêt de cibler les acteurs professionnels pour démultiplier les effets. Elles proposent des ateliers pour mettre en place des potagers urbains, sensibiliser à l’alimentation locale, installer des ruches sur les toits. Le Crédit Agricole et l’Aéroport de Toulon-Hyères sont déjà convaincus et fiers de récolter leurs légumes et leur miel. A qui le tour ?

Jardin d'entreprise

L’atelier bouturage du potager d’entreprise au Crédit Agricole de Provence – ©C.Chevier-Sème et Récolte

Habiter ensemble et autrement demain

Construire la ville de demain en intégrant des espaces jardinés et agricoles, c’est aussi réfléchir à un nouvel équilibre entre les usages en ville. L’habitat coopératif est une des solutions étudiée dans le projet européen Cooper’actif. S’interroger sur les manières d’habiter la ville, de coopérer pour être autonome, en énergie comme en nourriture. Inventer l’architecture de demain pour faciliter le vivre et le faire ensemble, sont autant de réflexions portées par des experts, des jeunes et des architectes d’Allemagne, Belgique, France, Pays-Bas et Pologne. Ces regards croisés permettent d’explorer le champ des possibles pour lier habitat et production en redonnant une place à l’agriculture en ville.

A Toulon, Les Alchimistes et les bio-déchets

Les Alchimistes collectent les bio-déchets – ©Sème et Récolte-les Alchimistes

Le déchet, une ressource

Autre initiative locale, la démarche portée par Les Alchimistes, un site urbain de compostage de bio-déchets sur le port de Toulon. L’association collecte la matière organique auprès des professionnels ou des collectivités et réalise un compost utilisable par les jardiniers urbains. Une manière de boucler la boucle en proposant un cycle complet de valorisation dans une logique d’économie sociale et solidaire.

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Pour aller plus loin

Et bien plus encore…

A Toulon, buffet de produits locaux

Dégustation des produits locaux préparés par Y. Silve et son équipe – ©C. Chevier

A bien y regarder, les projets sont partout, portés par des acteurs engagés qui veulent agir pour une ville plus durable.

  • Un projet de supermarché coopératif La Coop sur Mer doit voir le jour fin 2020 à Toulon.
  • Des chefs s’engagent et proposent une cuisine bistronomique et locale, à l’image de Yoann Silve du restaurant de l’Equerre à Toulon.
  • La Ville du Revest porte un projet de potager en aquaponie pour la cantine de ses écoles.
  • A la Seyne-sur-mer, une société coopérative lance le Village Provence Bleue dédié à la mise en valeur des saveurs et producteurs locaux.
  • Le territoire de Provence Verte porte un Programme Alimentaire Territorial. Il relève aussi le défi du programme « foyers à alimentation positive » pour faciliter l’accessibilité alimentaire.
  • Les Apéros Liberté du Club de la Presse 83 explorent les différentes facettes de l’agriculture urbaine dans des soirées-débats…
    le Club de la Presse 83 organise des apéro liberté

    Apéro Liberté du Club de la Presse 83 « manger varois » pour l’ouverture du festival – ©ACAUDRA

Autant d’acteurs et de projets en devenir qui ne demandent qu’à se fédérer pour porter plus haut et plus loin la voix de l’agriculture urbaine et de l’économie sociale et solidaire dans les territoires du Var.

 

 

Le Collectif Varois pour l’Agriculture Urbaine a vu le jour le 27 août dernier. Il regroupe des acteurs diversifiés : fermes pédagogiques, jardins partagés, entreprises de l’agriculture urbaine, paysagistes, associations et producteurs péri-urbains.

Sa mission ? Porter le Festival des 48h de l’agriculture urbaine,  promouvoir cette dernière et  soutenir les projets qui émergent sur le territoire. Ses ambitions ? Promouvoir les différentes formes d’agriculture urbaine, trouver des synergies locales entre acteurs et projets, sensibiliser, informer et éduquer les publics, proposer et peser sur les projets d’aménagements pour intégrer l’agriculture urbaine à sa juste valeur.