Zero herbicides en Luberon

Remplacer les herbicides par le travail du sol ou l’enherbement. C’est le choix fait par une vingtaine de viticulteurs des deux côtés du Luberon. Au bout de 5 ans, les résultats sont là. 30% de parcelles sans pesticides en plus, doublement des surfaces en herbe, le tout sans perte de rendement.

L’opération pilote est lancée en 2016. A la manœuvre,  le Parc naturel régional du Luberon, la Chambre d’agriculture du Vaucluse, l’Agence de l’Eau mais aussi l’Union des caves coopératives  Marrenon et l’AOC Luberon. Objectif : un changement des pratiques, qui permette de réduire la pollution de l’eau.

Des mesures sur 5 ans

L’agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse finance le projet. Les viticulteurs qui s’engagent sur le zéro herbicide vont recevoir une aide financière à l’hectare, dans le cadre de Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEC). Le projet prévoit aussi d’autres mesures d’aides au matériel et de formation.

Zéro herbicides

Plus d’herbicides mais un travail du sol pour Bastien Simon à Grambois – ©B.Simon

Installé sur 12 ha à Grambois depuis une dizaine d’années, Bastien Simon s’engage aussitôt. « Dès que j’ai connu la proposition, je m’y suis intéressé tout de suite. C’était lors d’ une réunion à la Tour d’Aygues, explique le jeune viticulteur.  Le bio me trottait dans la tête, je me suis dit que cette opération était un bon moyen de mettre le pied à l’étrier. Ca m’a permis de m’équiper. Comme je m’en suis bien sorti, je suis passé en conversion bio ».

Un bilan positif

Une vingtaine de viticulteurs s’engagent sur 130 hectares à zéro pesticides, mais ils vont même aller bien au-delà. A l’arrivée,  ce sont 350 ha qui ne reçoivent plus d’herbicides. Une opération réussie, donc, même si les résultats sur la qualité de l’eau sont difficiles à mesurer.

enherbement contre herbicides

Les vignes enherbées, une alternative aux herbicides – @M. Tempé CA84

« Les surfaces concernées sont trop petites et les temps de réactions sur la qualité des eaux souvent longs. L’eau reste ponctuellement polluée par différents herbicides et fongicides notamment, constate Cédric Proust, chargé de mission « Eaux et rivières » au Parc. Des produits pas seulement à usage agricole, mais aussi encore utilisés par les collectivités, les entreprises et les particuliers. Mais globalement ça s’améliore comme l’indiquent les suivis sur le Calavon-Coulon et les efforts collectifs devraient progressivement porter leurs fruits »…

Une évolution inéluctable

A la Chambre d’agriculture du Vaucluse aussi, on tire un bilan plutôt positif. « L’idée de ces mesures était d’aider au changement, mission réussie, nous confie Marion Tempé, conseillère viticole. Ceux qui ont acheté du matériel l’utilisent déjà sur des parcelles où ils n’étaient pas engagés. Les autres évoluent également et sur tout le territoire. De toute façon, la règlementation change, les viticulteurs sont poussés dans une démarche globale, ils doivent trouver des alternatives aux herbicides. Il est vrai que le travail du sol peut être coûteux, chronophage  et nécessiter des formations ».

zéro herbicide et méthodes alternatives

Le zéro herbicide nécessite des méthodes alternatives – ©M. Tempé CA84

Le travail administratif, le poids des bilans, du suivi de l’opération c’est ce qui a pesé pour certains viticulteurs. La cave Louérion installée à Cucuron, compte 140 coopérateurs sur 950 hectares de vigne. 20% sont déjà en bio, et d’ici 3 ans, ils seront la moitié.

« Ici l’arrêt des herbicides a paru naturel, l’intérêt pour ces pratiques alternatives aux herbicides est déjà présent, constate Carine Ratz, technicienne de cave. Certains les mettent déjà en œuvre, d’autres y sont venus. Beaucoup ont investi sur du matériel ». Résultat, les quantités d’herbicide ont chuté. Les coopérateurs sont passé de plus d’un passage par hectare et par an à 0.4 ou 0.5. Et la baisse se poursuit.

les vignes passent au zéro herbicide

Bastien Simon travaille 18 ha de vignes en conversion bio, il apporte son raisin de cuve à la Cave de Grambois ©B. Simon

Un plan prolongé

Face à ce bilan, le Parc naturel régional du Luberon et la Chambre d’agriculture ont décidé de prolonger l’opération pour 2021 et 2022. Cette fois avec le soutien de l’Etat et du FEADER, les fonds européens. Les mesures s’adressent aux viticulteurs du Luberon en conventionnel. Les candidats peuvent d’ores et déjà s’adresser au Parc, à la Chambre ou aux caves coopératives du Luberon, et cela jusqu’au 15 mai.


Pour aller plus loin

Bilan de l’opération MAEC

-24 viticulteurs sur le zéro herbicide, 273,75 ha,  aide de 73 960,19 €/an, 369 800,95 € sur les 5 ans  Financement 75% Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse (AERMC), dont 16 adhérents Marrenon, 14 conventionnels et 10 AB.
-35 viticulteurs ont bénéficié d’aides au matériel entre 2016-2019. Ils ont investi 630 000€ avec un taux d’aide moyen de 47% par AERMC.

logo MarrenonL’union des Caves coopératives MARRENON

Sise à la Tour d’Aygues, elle fédère 7 caves réparties de part et d’autres du Luberon et compte un millier de viticulteurs, dont un certain nombre en bio. (Sylla, Bonnieux, Maubec, Grambois, Louérion, Ansouis et Pertuis). La fédération affiche les labels Agri Confiance et Valeurs Parc.

Nouveau dispositif MAEC

Les viticulteurs peuvent s’engager pour deux ans sur une nouvelle MAEC (s’ils n’en ont pas déjà bénéficié)  -mesure « 0 herbicide : 278.82€ par hectare engagé
-mesure « enherbements permanents semés 1 inter-rang sur 2 : 122.39€ par ha engagé.

Renseignements : 
-Chambre d’agriculture : Viviane Sibé : viviane.sibe@vaucluse.chambagri.fr ou 04.90.23.65.50
-Parc naturel régional du Luberon : Mathieu Berson : mathieu.berson@parcduluberon.fr ou 04.90.04.41.93
-Les caves coopératives.