Habiter durable en PACA

Quitter la ville, s’installer à la campagne ou dans une petite ville… Un mouvement que la pandémie a accentué (430 000 parisiens ont quitté la capitale pendant le confinement*). Quelles motivations derrière cette démarche ? Bleu Tomate a posé la question à Jean Viard.

Pour le sociologue qui vit dans le Luberon, « les gens ont envie de rapprocher leur domicile de leur lieu de travail, dans une double logique écologique et d’un art de vivre. Un retour au local, mais pas à l’autarcie, car il s’accompagne du recours au système de livraison ». Et à la possibilité de télé-travailler, ce qui exclut de fait un certain nombre de métiers.

Ces néo-ruraux semblent rechercher avant tout la proximité de la nature. Ils réinvestissent le local, la vie de village. Et à choisir, un habitat plus sain. Le chercheur met cependant en garde contre les certitudes. Car ce qu’il observe des modes de vie, c’est qu’ils sont  éphémères !

Le modèle du pavillon-jardin

Restent néanmoins des tendances lourdes. Par exemple le modèle de la maison  individuelle entourée d’un jardin. 16 millions de français y vivent, contre 12 millions en appartements (et parmi ces derniers la moitié sont propriétaires de résidences secondaires).

Pour Jean Viard, si les politiques publiques après la guerre ont privilégié la densification urbaine, il semble que les français ont su échapper aux stratégies publiques en matière d’habitat. Conséquences : une consommation excessive de terres agricoles ou naturelles.

habiter durable ?

Jean Viard, sociologue, le retour au local, et son articulation avec le global. © Alexandre Dupeyron

Quelles solutions ?

« Il faut arrêter avec le mythe de la ville en hauteur, il est refusé, tranche Jean Viard. Et il faut sacraliser les terres arables. Comme on ne peut pas interdire aux gens de venir dans la région, ce qu’il faut, c’est repenser le territoire péri-urbain ».

Densifier la ville-jardins

Pour le chercheur, le développement durable en matière d’habitat passera par la densification de ces zones entre les villes centres et les campagnes à vocation rurale. Il faudra y développer les transports, mais aussi les constructions bois et les capteurs solaires. « Il faut rêver de maisons individuelles autonomes en énergie, et qui peuvent même recharger le vélo électrique et demain la voiture », explique le Directeur de recherche au CNRS.

Par quels moyens ?

En permettant aux propriétaires de construire ou aménager sur leur propriété un ou plusieurs autres logements. A condition qu’ils offrent une intimité que tout le monde recherche. Une solution qui assurerait un revenu supplémentaire aux propriétaires, ainsi que des liens sociaux intergénérationnels et la possibilité d’échanges de services.

Habiter en Luberon

Habiter en Luberon, mais aussi préserver une nature fragile -©JB

Les atouts de la région

Selon Jean Viard, Marseille comporte 120 000 maisons avec jardin, terrains sur lesquels on pourrait construire une autre maison.

Plus qu’ailleurs, on a la culture de l’ombre, du courant d’air, du frais. Et l’habitude de la solidarité. Toutes qualités qui ont fait leurs preuves avec la canicule de 2003. Et qui représentent des atouts face au changement climatique.

En ce moment, la cité phocéenne se repeuple, « parce qu’elle apparaît rebelle, une ville qui bouge, constate le sociologue. Ce sont surtout des jeunes diplômés, qui viennent créer des start-up. Mais en même temps, elle fait peur aux plus âgés et aux femmes (donc aux familles), parce qu’elle a une image violente ». Deux visions qui s’équilibrent aujourd’hui. Même si certains habitants quittent la ville pour s’installer à la campagne. Le casse-tête de l’habitat -durable ou non- n’est pas près d’être résolu.

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*Source : INSEE

Jean Viard, sociologue et directeur de recherche au CNRS, dernier ouvrage paru  « La France telle que je la connais ». Editions de l’Aube