Quand les besoins augmentent et que la ressource diminue, les difficultés commencent ! En Sud-PACA, manquent 35 Millions de m3 d’eau ! Des réponses sont apportées, mais il faut agir plus vite et plus fort, expliquent les responsables de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse (RMC).
Les 2/3 de l’eau consommée dans la région proviennent de la Durance et du Verdon, grâce aux barrages de Serre-Ponçon, Castillon et Ste-Croix. Ces barrages et ces cours d’eau sont eux-mêmes alimentés par les eaux de pluie et la fonte des neiges. Le 1/3 restant est fourni par les autres nappes et cours d’eau. Et depuis des siècles, les habitants ont creusé des canaux pour l’irrigation des cultures. Ils ont fait de la Provence une terre nourricière (lire ici notre article).
Les besoins en eau augmentent
Mais la démographie et les usages ne cessent de s’accroître. Ainsi l’irrigation agricole consomme 70% des prélèvements, l’eau potable 27% et l’industrie 2%. Depuis 2015 au moins, la plupart des bassins versants de notre région sont déficitaires. Autrement dit, la quantité d’eau laissée dans les rivières après prélèvements pour les besoins des activités humaines n’est pas suffisante pour le bon fonctionnement des espèces aquatiques. Ces bassins sont dits « en déséquilibre quantitatif ».
Changement climatique aggravant
Et le changement climatique est déjà à l’œuvre. « En 2022, de nombreux cours d’eau étaient à sec, les nappes ont été fortement sollicitées et ne se sont pas rechargées normalement. Cela a eu un gros impact sur la biodiversité», explique Annick Mièvre, directrice de la Délégation de Marseille de l’Agence de l’eau RMC.
Résultat : en mars 2023, la situation est plus tendue qu’en mars 2022. (sauf sur le bassin Durance/Verdon où la pluviométrie et l’enneigement ont été plus favorables). Dès le mois de février, certains secteurs ont été placés en vigilance dans le Vaucluse et le Var qui connait également un état d’alerte sur l’Argens. Enfin le bassin de l’Huveaune (dans les Bouches-du-Rhône) est en alerte renforcée.
Sans compter que la tension qui existe déjà sur la ressource va s’aggraver avec la chaleur (davantage d’évapotranspiration, moins de neige, pluies concentrées sur certaines périodes et localisées…), notamment l’été.
Qualité de l’eau : mieux mais…
Depuis les années 90, la qualité de l’eau particulièrement autour des aires de captages prioritaires, s’est améliorée, après restauration. La moitié des cours d’eaux est en bon état écologique.
Ce qui signifie quand même que l’autre moitié ne l’est pas. « On stagne en matière de bon état des eaux, 48% des cours d’eau restent notamment contaminés par les micropolluants (dont le glyphosate ou les médicaments). C’est toutefois moins que la moyenne nationale », souligne Laurent Roy, directeur général de l’Agence de l’eau RMC. Et les défis à relever sont de plus en plus pressants ».
Des procédures à l’oeuvre
En matière de quantité d’eau, les solutions passent par les PTGE (Projets de Territoire pour la Gestion de l’Eau). Ils sont élaborés en concertation avec tous les usagers de l’eau (collectivités, services de l’Etat, agriculteurs, représentant des entreprises, du monde du tourisme, des associations de protection de l’environnement, des associations de protection du consommateur…).
Les PTGE réalisent un état des lieux de la quantité d’eau disponible ainsi que des besoins pour les différents usages. Et les acteurs définissent ensemble les actions à conduire pour que la rivière revienne à l’équilibre naturel. En PACA, 20 des 21 bassins versants en déséquilibre disposent d’un PTGE approuvé. Le dernier le sera cette année.
Sobriété, efficacité
Parmi les actions mises en œuvre, la lutte contre le gaspillage et les économies. La chasse aux fuites et un meilleur pilotage dans les réseaux d’eau potable, les changements des pratiques d’irrigation vers plus de sobriété et d’efficacité (du gravitaire à l’aspersion ou au goutte-à-goutte) font partie de la panoplie.
Autre enjeu, favoriser la transition agroécologique. L’agroforesterie, le choix de variétés plus économes et plus résistantes, les expérimentations permettent de conserver mieux l’eau dans les sols et donc une meilleure santé des milieux naturels et de la biodiversité.
« Il ne faut pas opposer nature et agriculture, souligne en effet Laurent Roy. L’agriculture a besoin d’eau mais nous avons aussi tous besoin des milieux fonctionnels. Pour sauver l’humanité, il faut sauver la biodiversité ». Au programme aussi, la désimperméabilisation des sols et la protection des terres agricoles dans les périphéries urbaines.
Réutiliser, substituer, stocker
Enfin la réutilisation de la ressource, comme celle d’eaux usées traitées ou encore la substitution de prélèvements dans une rivière non en déficit pour en soulager une autre en souffrance sont aussi des solutions. Tout comme des stockages s’ils répondent aux exigences écologiques et économiques.
Grâce à ce panel de mesures, les PTGE conduits entre 2015 et 2021 ont permis 14M de m3 d’économie sur les 21 bassins versants de PACA. Soit environ 10% de prélèvements en moins. Mais dans le même temps, l’urbanisation se développe tout comme les surfaces irriguées …
« Se bouger et tout de suite »
C’est l’injonction lancée par le Directeur général de l’Agence de l’eau ! Avant d’évoquer un dernier atout de la région, le Rhône. Fleuve le plus puissant de France, il a déjà perdu de sa superbe. Moins 13% de débit à l’étiage aujourd’hui e(en période de basses eaux) aujourd’hui à) Beaucaire,, moins 20% supplémentaires attendus en 2050. Malgré tout, il reste assez abondant…
L’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse prépare le 12e programme d’intervention 2025/2030. Il devra répondre aux trois enjeux de la qualité et de la quantité de l’eau, mais aussi de la restauration des milieux naturels. Une course de vitesse est engagée pour sauvegarder la ressource en eau dans la région. Et la vie de ses habitants, tout simplement.