« Nous disons souvent que les circuits courts sont plein d’intérêt.  Mais nous ne savons pas vraiment pourquoi ! Alors nous avons voulu mesurer objectivement l’impact d’un achat en circuit court sur l’économie locale ». Florian Pascal, président du Réseau des magasins de producteurs de la région PACA.

Le 18 novembre 2021 à la Fruitière numérique de Lourmarin (Vaucluse), les représentants de l’association Trame, de l’Inrae et du Réseau des magasins de producteurs de Provence-Alpes-Côte d’Azur étaient réunis pour présenter les résultats d’une étude inédite à cette échelle.

« Quelle est la contribution des magasins de producteurs au maintien de la richesse économique sur un territoire ? ». Voilà la question à laquelle les chercheurs ont répondu en mesurant notamment « l’effet multiplicateur de l’achat local ».

Florian Pascal, président du Réseau des magasins de producteurs de Provence-Alpes-Côte d’Azur, a suivi ce projet dès ses débuts. Lors d’une interview, il nous explique cette étude.

Florian Pascal (à gauche), avec sa sœur et son frère sur leur ferme.

Agriculteur GAEC – Ferme le Moulin Brun, Aubenas-les-Alpes (04) et président du Réseau des Magasins de Producteurs de PACA

 

Bleu Tomate : Pourquoi réaliser une telle étude ?

Florian : « Tant pour la communication que pour la commercialisation, il était intéressant pour notre réseau d’avoir une étude scientifique qui prouve les bienfaits d’un magasin sur son territoire. Nous ne parlons pas que d’intérêts économiques. Le développement du milieu agricole est aussi un aspect à prendre en compte. Quand une ferme s’implique dans les circuits courts, il ne s’agit pas seulement de vendre en circuit court, mais aussi de vivre en circuit court, c’est-à-dire créer des emplois ou du lien social par exemple. »

Qu’est-ce qu’un magasin de producteurs ?

Un magasin de producteurs est un commerce géré et approvisionné par un collectif d’agriculteurs locaux. Les producteurs assurent des permanences à tour de rôle pour vendre l’ensemble des produits des associés, et assurer la gestion de la boutique. La structure collective vend pour le compte des fermes directement, sans intermédiaire commercial. Elle prélève une commission sur les ventes pour couvrir les charges de fonctionnement du magasin uniquement.

Bleu Tomate : Comment avez-vous procédé ?

Florian : « Nous avons travaillé avec une chercheuse de l’INRAE, Yuna Chiffoleau, qui avait déjà expérimenté une étude sur les retombées économiques d’un magasin en Occitanie. Nous avons peaufiné sa démarche et étendu le procédé à plusieurs commerces […]

L’étude porte sur un échantillon représentatif de producteurs sélectionnés dans cinq magasins du Luberon : Unis Verts Paysans à Forcalquier (04) ; Luberon Paysan à La Tour d’Aigues (84) ; Naturellement Paysan à Coustellet-Maubec (84) ; Côté Champs de Provence à La Brillanne (04) ; La Belle Ferme à Manosque (04).

Nous avons ensuite retracé le circuit de l’argent dépensé par les consommateurs dans un magasin de producteurs, puis par les producteurs et salariés du magasin eux-mêmes. »

Bleu Tomate : Quels sont les résultats ?

Florian : « Le principal résultat est donné par le « coefficient multiplicateur local » [ci-dessous]. Je donne un exemple : si un consommateur vient dépenser 100 € dans un magasin, combien va-t-il en rester in fine sur le territoire ? Nous avons calculé qu’entre 2,4 et 2,8 fois de cette somme est redépensée localement, en prenant en compte 3 niveaux de dépenses [achat par le consommateur dans le magasin, dépenses du magasin de producteurs, dépenses des agriculteurs et des salariés impliqués dans les magasins]. Cela témoigne d’une bonne redistribution locale étant donné que le coefficient maximal de 3 signifie que l’ensemble de l’argent est dépensé sur le territoire. »

 

Coefficient multiplicateur local

Le « coefficient multiplicateur local » est un outil de mesure de l’impact économique des magasins de producteurs sur leur territoire. Il permet d’identifier la part des richesses générées qui reste (ou se multiplie) sur le territoire local et la part qui s’échappe vers l’extérieur.

Bleu Tomate : Et les autres conclusions de l’étude ?

* ETP : l’Equivalent Temps Plein (ou ETP) est une unité de mesure d’une charge de travail et d’une capacité de travail d’un employé. Pour une personne engagée à temps plein, il est égal à 1. A mi-temps, il est égal à 0,5.

Bleu Tomate : Où va l’argent dépensé hors du territoire ?

Bleu Tomate : Qui profitera de cette étude ?

Bleu Tomate : Quel est votre prochain projet ?

Florian : « Ce qui serait intéressant désormais, c’est de définir quel est le coefficient dans d’autres circuits de distribution. C’est la suite que nous voudrions donner à cette étude, mais rien n’est engagé encore. D’après les premières approche que nous avons sur les circuits longs, ce coefficient serait de 1,5 à 1,8. Encore faut-il avoir des études pour le prouver scientifiquement. »

Bleu Tomate : Un mot pour la fin ?