Inspirée par la Convention des Citoyens pour le Climat, la Convention des Entreprises pour le Climat (CEC), d’abord activée au niveau national, va se décliner dans les territoires. Celle de Provence-Corse est la première à mettre en place ce processus.
La CEC a pour objectif affiché d’accélérer les stratégies bas carbone et de reconnexion au vivant des entreprises. A chacune de formuler des propositions concrètes, ambitieuses et exigeantes en faveur de la transition et sa trajectoire vers une économie écologique.
« Il est désormais temps que le monde économique prenne toute sa part dans la transition » – Eric Duverger l’un des cofondateurs de la CEC. Après une vingtaine d’années chez Michelin dans des fonctions Finances, Marketing, Stratégie, il décide à son retour des Etats-Unis en Juillet 2020 de prendre 2 années sabbatiques pour se dédier à la transition écologique en lançant l’initiative de la « Convention Entreprises Climat ».
Un marathon sur 10 mois
Sur 120 entreprises de la région, ayant exprimé leur intérêt pour le projet, 66 sont prêtes dès ce 20 janvier à participer à leur première session de travail. Il y en aura 6, sur une durée de 10 mois, de janvier à octobre 2023.
Chaque entreprise sera représentée par un binôme composé de son dirigeant (directeur général, fondateur) et son « Planet Champion » (binôme avec un réel pouvoir de décision dans l’entreprise, avec un rôle de suppléant et de “courroie de transmission” opérationnelle vers le reste de l’entreprise. Le plus souvent le responsable RSE ou encore de la Communication, des Finances, des Ressources Humaines..).
Une prise de conscience encore globalement insuffisante
A écouter Nicolas Chabert, président de la CEC Provence-Corse, et participant à la première édition nationale, le parcours qui attend ces dirigeants ne sera pas un long fleuve tranquille. D’ailleurs les deux premières sessions se déroulent à huis-clos. Le premier travail qui est demandé est un vrai travail d’introspection : « Où va mon entreprise ? De quelle manière contribue-t-elle à la dégradation de nos milieux et notre environnement ? Quelle est ma responsabilité dans ce constat ??? ». Le chef d’entreprise avoue même : « Je me suis pris une gigantesque claque, et je me suis vu comme un véritable prédateur face à l’ampleur des dégâts et de mon impact !!! ».
Ne pas opposer business et réflexion écologique
« Entreprendre, diriger, reste un exercice d’optimisation sous contrainte de rentabilité financière. Ce qui n’est pas rentable n’est pas entrepris », tel est le leitmotiv classique de l’entreprise. Pourtant, Nicolas Ponson, fondateur et co-dirigeant de REDMAN, ambassadeur du mouvement Impact France SUD et Membre de la CEC, expose son propre constat : investir sur ce projet, tant en énergie qu’en ressources financières ne l’empêche pas de voir progresser le chiffre d’affaires de sa propre entreprise. Il a tout simplement pris de l’avance sur ses concurrents directs. « La question que doit se poser le dirigeant est toute simple : est-ce que mon entreprise existera toujours d’ici 5 ans ???». Vendre plus pour gagner plus est une injonction intenable dans un contexte de limites planétaires dépassées et de fin d’abondance.
Accepter de « sortir du cadre »…
Chacun doit donc se mettre en route. Prendre conscience de la dimension du changement nécessaire. Repenser son modèle d’affaire dans le cadre des limites planétaire. Passer d’une entreprise « extractive » à une entreprise « régénérative ». Et telle est bien la principale difficulté rencontrée par les participants, se projeter dans « autre chose ». Ce cheminement individuel bénéficiera cependant d’un soutien collectif et semble-t-il d’une réelle bienveillance.
Partager pour avancer
Le point sur lequel insistent les représentants de la CEC Provence-Corse est celui de la richesse des échanges. C’est ce qui permet de partager doutes et inquiétudes, d’aborder les solutions sous un angle différent. Et c’est rendu possible grâce à la diversité des entreprises présentes. C’est bien ce travail d’intelligence collective mise en œuvre qui permettra de changer d’optique. Les dirigeants réunis ont pour objectif de créer un nouveau modèle d’entreprise. L’entreprise à impact positif, c’est celle qui décide de régénérer. C’est-à-dire aller au-delà de la réduction d’impacts négatifs ou de leur neutralisation, pour s’engager vers la génération d’impacts positifs nets pour les écosystèmes et la société.
Régénérer et démultiplier via les feuilles de route
Les entreprises vont mener leur réflexion individuellement et collectivement. Les livrables sont pré-définis : il s’agit notamment de rédiger la feuille de route de transformation. Ce n’est pas le seul engagement. Il s’agit aussi de prévoir la mesure des impacts, « l’impact score », sans lequel aucune démarche n’a de sens ni d’avenir. Il faut apporter la preuve de la faisabilité, la viabilité, l’efficacité des actions envisagées. C’est ainsi que sera rendu possible le partage des bonnes pratiques et la duplication des initiatives.
La feuille de route tient en 6 items : la question « générative » (quelle redirection de l’entreprise). Le nouveau cap 2030 (objectif annoncé). Les leviers de redirection (les orientations majeures). Les impacts mesurables. Le plan d’action (la traduction opérationnelle des orientations). La mobilisation des écosystèmes (se rapprocher des autres acteurs de son territoire).
Une méthode de travail éprouvée
Pour stimuler, informer, accompagner, encourager les groupes constitués en « camps de base », la CEC mise sur le professionnalisme de tous les intervenants. Scientifiques, sociologues, expert du GREC Sud, spécialistes de la biodiversité, coach, facilitateur… La réussite existe aussi grâce à la mise en oeuvre d’équipes solides et performantes. Elles contribuent grandement à un résultat dont se félicitent tous les participants à la CEC nationale.
L’organisation des CEC de territoire est une construction où chacun a sa place : l’équipe opérationnelle, les membres du Bureau du territoire (CEC Provence Corse), le comité des garants (personnalités de haut niveau pour accompagner la CEC et son mouvement comme l’ADEME, le Comité des Entreprises à mission, la BPI ou encore la Fondation Good Planet et bien d’autres), les financeurs (entre autres l’Etat, l’OFB ou encore la Région Sud).
Objectif : changer de paradigme. Ne plus être dans l’éco-anxiété et passer à l’action…
L’information des pouvoirs publics
La première édition de la CEC de 2020 a été conclue par la remise d’un rapport le 25 octobre 2022 au Ministre de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires ainsi qu’à la Ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme.
Qui pour la CEC Provence Corse ?
Les profils des entreprises qui se lancent le défi de la CEC sont très variés : le chiffre d’affaires réalisé couvre un large spectre : de 1 M€ à plus d’1 Mrd€. En termes de taille d’entreprise, les entreprises de moins de 10 salariés cotoient celles qui emploient plus de 5000 collaborateurs. De même, toutes les typologies sont représentées, de l’institutionnel au grand groupe, en passant par l’entreprise familiale ou l’indépendante. Enfin, les grands secteurs économiques sont présents, entre agroalimentaire, santé, industrie, transports, immobilier/BTP, services et tourisme.
En Provence-Corse, le département des Bouches-du-Rhône est fortement représenté (près de 80% des entreprises participantes)