Entre les étés 2006 et 2012, le photographe Salah Benacer a suivi les derniers villégiateurs « sauvages » de cette vaste étendue de sable de Camargue. Il en a publié un livre, « La Plage », plein de sensibilité et d’humanité.

Une histoire collective. La dernière appropriation « interdite » d’une plage d’Europe par une communauté d’amis, ouvriers, travailleurs sociaux, coiffeurs, infirmiers…Voilà ce que fut, durant des années, une partie de la plage de Piémanson, en Camargue. Un bric-à-brac estival de caravanes et de voitures, de paravents battus par le mistral, de canapés posés à même le sable, de générateurs électriques, rassemblés ici et là en des hameaux sans nom. Un lieu foutraque et peu écolo, sans doute, mais un lieu humain. Très humain. Des soirées apéro, des rires d’enfants, des courses sur la plage, des siestes sous le cagnard…

la plage de Piémanson Camargue -photo S. Benacer On perçoit tout cela en feuilletant « La Plage », le livre que le photographe Salah Benacer a publié après avoir suivi plusieurs étés de suite un petit groupe de plagistes de Piémanson., des locaux pour la plupart ayant leurs habitudes ici de père en fils, de mère en fille… « Cette plage est, avec le temps, devenue le symbole d’une appropriation collective et populaire d’un espace au nom d’une liberté, d’une convivialité et d’un droit à le vivre dans la nature pendant quelques temps », dit le photographe.

Liberté d’être

A l’embouchure du delta du Rhône, des mondes se rejoignent dans un espace sans contrainte où les règles de vie sont « basées sur un partage communautaire des tâches et une liberté d’être ». Au cœur de l’été, chacun va et repart à sa guise, il n’y a pas de rendez-vous précis.

Plage de Piémanson-photo Salah Benacer Salah Benacer a su capter ce lien amical et bienveillant qui unit les estivants, les discussions sans fin, le sentiment d’appartenance à une communauté privilégiée, avec ses codes de l’été, ses moments d’abandon. Le nomadisme n’est désormais plus possible, les autorités ont interdit les installations sauvages sur le domaine public de Piémanson. Restent les souvenirs et ce livre, qui témoigne d’un temps où l’on pouvait encore vivre son rêve en échappant aux fourches caudines de l’administration.