Fils d’agriculteurs belges, Charles Culot a étudié le théâtre à l’Ecole d’acteurs de Liège. Sa pièce est le résultat d’une enquête à la fois journalistique et artistique.
Entre 2010 et 2014, Charles Culot a recueilli des heures de témoignages auprès d’une trentaine de familles de fermiers en Belgique comme en Lozère ou en Provence, près d’Avignon. L’amour du métier mais aussi les difficultés, un monde qui change trop vite, dans lequel les agriculteurs perdent leurs repères, leur libre-arbitre, et bientôt leurs ressources…
Une fois le projet expliqué, la parole se libère, forte, gaie ou désespérée, des mots que le jeune auteur-interprète rassemble et synthétise dans une pièce de théâtre qu’il joue avec une jeune actrice, Valérie Gimenez.
Tantôt ils restituent eux-mêmes les paroles des paysans, tantôt ils projettent directement sur grand écran le témoignage des agriculteurs, dans une conversation ininterrompue entre la réalité de la vie paysanne et celle des acteurs. En découle une critique en règle de l’agriculture industrielle, la perte de sens et de qualité qu’elle entraîne, les suicides, la culpabilité, l’épuisement, les faillites…
Primée au festival off d’Avignon
La Compagnie Art & tça a joué « Nourrir l’Humanité, c’est un métier » près de 150 fois avant de donner la pièce cet été au Festival off d’Avignon, où elle rencontre l’adhésion du public, avec des représentations qui affichent complet la plupart du temps.
Elle séduit aussi l’association « 5’ hop » qui lui décerne le Prix Tournesol version « Climat ». Ce prix récompense les spectacles vivants qui s’inscrivent dans la défense de l’environnement mais aussi dans les valeurs de décroissance, de citoyenneté, de justice sociale ou d’économie solidaire…
La Compagnie est invitée à donner une représentation dans le cadre du Sommet sur le Climat à Paris fin novembre. « Et la pièce n’a pas fini de tourner, elle est engagée pour au moins cinq ans encore », se réjouit Charles Culot, qui cite la France mais aussi la Suisse et le Québec.
Une démarche artistique et citoyenne
Pour le jeune auteur producteur, le théâtre n’a de sens que lié à une démarche journalistique, enracinée dans la vie quotidienne, témoin des questions fondamentales quant à l’avenir de l’Humanité sur la planète. Ainsi chaque représentation est suivie d’un temps de débat et d’échange entre le public et une personnalité invitée, professionnel ou associatif de terrain.
Interroger le présent
Et la Compagnie Art & tça ne manque ni de projets ni de sujets de luttes : OGM, traité TAFTA, situation de la Grèce, question de l’eau, de la pauvreté, modèle éducatif… « Les gens sont de plus en plus intéressés, les jeunes veulent reprendre les terres autrement, les luttes se réveillent », explique Charles Culot, qui constate en même temps que « l’histoire va trop vite et les dangers sont grands »…
Lui et ses compagnons ont choisi de parler avec leur cœur et veulent voir les portes qui s’ouvrent : la consommation locale, l’envie de se réapproprier son environnement, son alimentation.
Inlassablement, Charles Culot manifeste, milite et donne à réfléchir et agir, entre démarche théâtrale et documentaire, il cite Bertold Brecht : « Du théâtre oui, mais pour quoi faire ? »